Se créer une identité graphique : Tout le monde peut dessiner.

« La disproportion est un parti pris pour dessiner plus rapidement et plus facilement »
« Evidemment que dans le manga on choisit une façon simplifiée de dessiner, c’est pour respecter les délais ça »
« Le manga c’est du travail à la chaîne pas fini, donc pas de bonne qualité »
« Non mais tout les mangaka font dans la disproportion, c’est donc pas des modèles en tant que dessinateur »

Bon, je m’excuse par avance car cet article sera plus un point sur le sujet du manga (je ne parlerais d’ailleurs ici que de manga même si le sujet peut être accessible avec d’autres médias) que d’une méthode comme j’ai l’habitude de faire. Maiiiiis il y a des points qui mérite vraiment, mais VRAIMENT, d’être mis au clair.

Avant tout mettons les choses au clair : il ne s’agit pas ici de chercher des poux à ceux qui bavent avec délectation et abondance sur la mouvance manga. Tout simplement parce que ce n’est pas l’objet de l’article, mais également car je ne suis pas de nature belliqueuse. Donc on laisse la hache de guerre là où elle se trouve, on prend son plaid, des chamallow et des fraises tagadas pour les faire griller et un chat tout fluffy (pas pour le griller bande de cinglé) à papouiller car une bonne ronronthérapie ne nous fera sûrement pas de mal. C’est bon ? Tout le monde est « oklm et posey » ? Alors on y va !

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Avant d’entrer dans le vif du sujet faisons un petit point Histoire !
Le terme manga est à la base un terme qui peut se traduire par « image dérisoire » et trouve son origine dans les estampes japonaises de Katsuhika Hokusai, un caricaturiste. Dérision et caricature faisant extrêmement bon ménage, la déformation à outrance souligne l’absurdité des questions abordées dans les œuvres d’Hokusai. L’efficacité est telle que finit par naître de cette audace alors neuve une forme d’expression graphique totalement fertile.
Depuis sa naissance au stade d’estampe jusqu’aux succès mondiaux tel que One Piece qui nous sont plus familier, l’influence laissée par les caricatures de Hokusai se retrouvent encore, que cela soit pour l’esthétisme, l’humour ou tout simplement la recherche d’un style propre à l’individu et donc immédiatement identifiable.
Ces derniers mots m’offrent une excellente transition pour revenir au sujet de mon dernier article traitant de la création d’un manga. Dedans je n’avais abordé que les méthodes pour créer l’identité graphique d’un personnage. Je n’ai pas spécialement attaqué le sujet à venir car je pensais préférable de ne pas vous cribler d’information jusqu’à saturation, mais également car ce dont je vais vous parler va bien au delà du chara-design.

Prenez un manga de Naoki Urasawa (Monster, Pluto), de Hiromu Arakawa (Fullmetal Alchemist, Arslan) et de Kaori Yuki (Ludwig Revolution, Angel Sanctuary) et comparez les. Vous me direz sûrement que ce que je vous demande de faire est totalement idiot car la comparaison n’a juste pas lieu d’être… et vous aurez pleinement raison ! En effet, les trois auteurs que je vous ai cité n’ont absolument rien à voir entre eux et possèdent une identité graphique très forte et immédiatement reconnaissable. La patte est souvent discernable dans la mise en page, le look des personnages, le design des objets ou encore la compositions des décors. Sur ce point je ne vous apprends rien car le manga n’est pas un cas exceptionnel pour cela. On retrouve une forte identité visuelle chez des auteurs de BD franco-belge, de comics américain, chez les cinéastes (coucou Burton)… bref, partout.

« Mais alors… qu’est-ce que le manga a de plus pour se créer une identité visuelle par rapport à tout ces autres médias ? »

Si tu me poses cette question, alors tu es fort curieux et je t’en félicite ! Eh bien reprenons l’article depuis le début et retrouvons notre bon ami Hokusai et son goût pour la disproportion. Absurdité, caricature, déformation, exagération, sont en effet les termes fondateurs du manga, alors pourquoi s’en priver ? Eiichiro Oda, créateur du phénomène One Piece a inventé l’identité de son futur manga à succès afin qu’il soit impossible de confondre son œuvre avec n’importe quel autre manga… et est il nécessaire que je vous rappelle à quel point l’étude de son design a porté ses fruits ?

Revenons donc au début de l’article et contextualisons un peu avec tout ce que je vous ai apporté entre temps et réfléchissons ensemble à la question : choisir de donner dans la disproportion fait-il de nous des quiches en dessin académique ?
La réponse en dessin :

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A gauche: mon avatar dessiné avec ma patte. Au centre: mon avatar dessiné avec des proportions plus académiques. A droite: mon avatar… dessiné avec deux, trois erreurs.

Il n’y a aucune comparaison possible, de près ou de loin, avec ou sans lumière, avec ou sans myopie en stade avancée, entre une disproportion voulue et une erreur d’anatomie.
Si vous connaissez les vidéos de LinksTheSun, vous vous rappelez sûrement de ce qu’il dit dans sa vidéo sur la musique classique: « Mes artistes préférés sont ceux qui sacrifient les règles dans leur recherches du Beau avec un grand « B ».
L’artiste qui veut aller au delà de la maîtrise de son art en apprend les codes, les détruits, et les reconstruits afin d’y exploiter au maximum son univers, sa vision du monde et son esthétisme.

Mélangeons donc toutes ces informations dans un gros bocal, secouons un bon gros coup et tirons en une première conclusion. Dire que tel ou tel auteur de manga n’est pas un dessinateur digne de ce nom car ses codes ne sont pas conformes à ceux du dessin dit « académique », c’est à un peu près aussi pertinent que le contenu des conversations que l’on peut trouver dans le PMU du coin à l’approche d’élection.

« Mais alors, toutes les déformations dans les mangas sont voulues et calculées » ?

Que l’on ne me fasse pas dire ce que je n’ai pas dis ! Les mangakas n’ont pas non plus été visité par une fée alors qu’ils étaient nouveau né et n’ont pas reçu le don de dessiner selon leur bon vouloir sans jamais commettre la moindre erreur.
L’attaque des titans par exemple est un manga que j’aime beaucoup et qui a fait un énorme buzz à sa sortie, ce qui n’empêche pas que des erreurs de dessin technique sont présentes à chaque chapitre même si elles ont diminué au fil des tomes. Je prends là un exemple assez extrême en citant un succès mondial mais je peux vous assurer que si vous avez la chance de feuilleter un magazine de manga japonais (je n’ai pas encore eu l’occasion de feuilleter le Jump, mais il paraît qu’il y a de sacré surprise) vous y verrez de tout et de… n’importe quoi. Littéralement n’importe quoi.
Il faut savoir qu’au Japon il n’est pas rare de laisser un auteur même avec un niveau de dessin relativement moyen se lancer dans l’aventure et beaucoup d’auteurs apprennent ainsi sur le tas.
Si vous êtes des lecteurs assidus de manga, vous avez sûrement eu le loisir de comparer le premier tome d’une grosse collection avec le dernier sortie (franchement avec Ah ! My goddess faut le faire, c’est drôle). Beaucoup de mangakas apprennent sur le tas et croyez moi, il n’y a rien de plus formateur que de faire des planches de BD pour s’améliorer. Les auteurs de manga sont comme nous et évoluent grâce à leurs erreurs, et c’est bien pour cela que je trouve cela relativement petit et fermé de juger un manga uniquement à son niveau de dessin, d’autant plus s’il s’agit du tout premier manga de l’auteur en question.
Il faut savoir que contrairement au Japon nous sommes extrêmement exigeants (pour pas dire pètes burnes) sur le sujet de la forme et cela pour tout les médias. Alors condamner une œuvre pour une ou deux erreurs de dessin technique, c’est probablement passer à côté d’un énorme potentiel. Oui son dessin est faiblard, mais peut-être son univers est-il solide et unique, peut-être la psychologie de ses personnages nous parlera et nous touchera, peut-être les thèmes abordés seront pertinents et subtils. Mais comment savoir tout cela si on en reste qu’au premier aperçu ?

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« Oui mais s’il est pas bon en dessin mais aime son histoire, il peut travailler en duo avec un dessinateur comme dans Bakuman non ? »

Et c’est en effet une possibilité qui se retrouve souvent dans le milieu professionnel, c’est d’ailleurs souvent là que la patte fait la différence. On aura plus tendance à vouloir laisser sa chance à un petit nouveau avec un niveau pataud en dessin mais une patte totalement audacieuse que si son style était totalement déjà vu. Il est effet plus simple de se lancer avec une identité graphique déjà acquise et un niveau de dessin à faire level up que l’inverse, tout comme il est plus difficile d’améliorer sa méthode de scénario que tout se qui touche à l’aspect technique du bousin.

Evidemment que nous autres, auteur, sommes dans notre légitimité de ne pas apprécier un manga car son niveau de dessin ne répond pas à nos exigences. Mais cela nous permet il de considérer l’auteur de l’oeuvre avec condescendance ? Je ne sais pas vraiment s’il est nécessaire que j’apporte une réponse à cette question que j’estime comme rhétorique.

J’ai fais cet article pour deux raisons. Déjà pour faire la différence nette entre un choix stylistique et une erreur de dessin mais également pour dédramatiser les dites erreurs. J’ai eu de nombreuse fois l’occasion de parler avec des gens qui avaient très fortement envie de se lancer dans le dessin mais ne se sentait pas pourvu du talent nécessaire pour. A ces personnes j’ai envie de dire que le talent, on s’en fout, sincèrement. La réussite c’est dû au travail, à la ténacité et (on va pas se mentir) à la chance. Je suis une personne qui exècre la sacralisation du talent. Je trouve que ce culte n’est qu’un moyen de faire avaler aux rêveurs complexés que la recette menant à l’épanouissement personnel et artistique est du domaine de l’inné. Pour plaisanter, j’ai dis tout à l’heure qu’aucune fée ne se penchait sur le berceau des mangakas à leur naissance et c’est une vérité.
Le talent, le don, le génie, la gloire réservée aux élus, tout cela n’est que de la poudre aux yeux. On naît tous avec une manière de percevoir et de recevoir qui se forgent avec notre environnement et notre éducation. Personne n’a le même vécu et pas plus les mêmes facilités que son vis-à-vis. Ne prenons donc pas des idoles pour nous donner nous l’impression d’être insignifiant en comparaison avec leur soit disant divinité, mais ayons des modèles qui nous donneront envie de nous dire « un jour je réaliserai mes objectifs, comme l’a fait cette personne ».

Pour conclure cet article, j’ai envie de citer (car mon prof de philo de terminal disait qu’il faut toujours citer ses maîtres à penser) l’un de mes long-métrage d’animation préféré de chez Pixar en me permettant de revoir et de revisiter la devise d’Auguste Gusteau en vous affirmant une chose que personne ne me retirera de la tête :
Tout le monde peut dessiner.

Merci de m’avoir lu.

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Créer un chara design: Stylisme de Geek

Une fois la psychologie de votre personnage déterminée (si ce n’est pas encore fait je vous invite plus que vivement à lire l’article sur le sujet, sinon celui la ne servira à rien et ça sera très la tristesse) il serait peut-être temps que votre progéniture fictive pointe enfin le bout de son nez. Vient donc le moment fort sympathique de s’occuper de son chara design (également connu sous le nom de « Chara deza » chez nos amis nippons).

L’apparence du personnage permettra de fixer le point de vue du lecteur sur plusieurs critères : la tranche d’âge de votre personnage, son caractère, son rang social, l’époque à laquelle il évolue et le type du récit (fantaisie, science-fiction, tranche de vie, etc…) . D’une certaine manière il est une sorte de bande annonce sur patte de votre oeuvre, donc défense de bâcler. Au premier regard, le lecteur lambda devra se faire une première idée du personnage que cela soit au travers de sa morphologie, de son faciès, de sa chevelure, de ses fringues ou de ses accessoires.

Pour illustrer ce qu’est un chara design simple mais qui peut éventuellement fonctionner, on va prendre l’exemple de mon propre avatar :

Comic strip 1

On récupère donc tout les éléments fléchés, et on met ça sur tableau, et voilà les informations que l’on peut récupérer avec un simple aperçu :

comic strip 3

Bref, le résumé de Berlioz sans être très flatteur ne manque pas de véracité. Un simple aperçu permet de se faire une idée de l’aspect excentrique du personnage, ainsi que de son côté tête en l’air tout comme de son activité principale. De plus, la forme des mèches de cheveux, les déchirures du manteau, la présence des antennes ainsi que sa morphologie filiforme créent immédiatement une silhouette qui permettra à ce personnage de se démarquer des autres, même si l’on ne voyait que son ombre.
Ce que nous montre également cet exemple c’est que l’attitude que le personnage porte à son apparence est très révélatrice de sa personnalité et de ses habitudes. En effet, vêtements tâchetés, déchirés ou bien au contraire entretenus avec amour sont tant d’élément qui permettent de donner du caractère à votre chara deza. C’est un procédé que l’on retrouve beaucoup dans les récits comportant des personnages vêtus du même uniforme. Voyons cela avec les uniformes de l’école Poudlard dans la saga Harry Potter : les manières dont Hermione Granger, Ron Weasley et Luna Lovegood sont affublés sont très éloquentes. La tenue toujours impeccable de Hermione témoigne de son sérieux et de son désir d’être bien perçu par le corps enseignant. La cravate desserrée de Ron illustre un je-m-en-foutisme non dissimulé que lui inspire le respect de l’étiquette. Quant à Luna… hum… inutile d’en dire davantage hein ?

En parlant d’uniforme (vous avez vu cette transition un peu ?), il vaut mieux que le design de votre PP ne soit pas surchargé, n’oubliez pas que vous allez devoir le dessiner sur des dizaines voir des centaines de planches. Par conséquent, si sa tenue est truffée de détail vous allez vite comprendre l’ampleur de votre erreur (sauf si vous disposez à la cave de toute une tripoté d’assistant que vous exploitez sans la moindre vergogne… si c’est le cas, faites vous plaisir.). Cependant la tenue de votre personnage n’est pas dans l’obligation d’être simple pour autant, bien au contraire. Une tenue originale attire l’oeil et parfois même la sympathie du lecteur ; et surtout, SURTOUT, ça attire les cosplayeurs. Et pour cause, ils sont de véritables panneaux publicitaires ambulants et vous feront votre promos gratis en convention ou sur leur page FacBook. Alors, caressez les cosplayeurs dans le sens du poil en leur proposant de sympathiques costumes à réaliser (tout en réalisant sur des illustrations exclusives des tenues fourmillantes de détails : motifs prise de chou, pans de tissu défiant la gravité et dégradé de couleur pouvant faire pâlir un troupeau de My Little Pony… ils vous détesteront sur le coup mais en réalité la difficulté ils aiment ça, croyez moi). Et au delà du côté com’, savoir son personnage digne d’être cosplayé, y’a rien de plus gratifiant !

En bref, posez vous donc toutes ces questions : à quelle époque et dans quel univers se situe mon histoire ? Quel vêtement mon personnage porterait il ? De quelle manière les porte-t-il ? Puis je le dessiner ainsi sur des pages et des pages entières sans trop perdre de temps ?
Ah et évidemment lorsque vous créez votre charadesign, n’oubliez surtout pas de manifester le fameux X dont nous avons parlé dans l’article précédent. N’oubliez pas que cet élément est le noyau de la création de votre personnage, cela serait quand même sacrément ballo de l’oublier à une étape aussi importante !

Bon, vous avez tout les éléments qu’il vous faut ? On est bons, on est chauds, on est motivés ? Alors maintenant on met tout ça au propre sur un tableau qui permettra de présenter votre personnage. Le tableau se présente en général avec une vue d’ensemble de votre personnage, ainsi qu’un zoom sur le visage (et si vous en sentez la nécessité: un zoom sur un accessoire ou une vue de dos et/ou de profil). Soyez sympas de laisser un espace libre afin qu’il y ait un peu de place pour indiquer les informations élémentaires de votre personnage : son nom, son âge, sa race (pour les récits fantaisies ou SF), son activité ainsi que ses traits de caractères principaux.

Destiany retouche
Démonstration avec l’un de mes propres chara deza
Salica retouche
Et un autre, c’est jour de fête

Eh bien toutes mes félicitations, vous avez à présent tout les éléments pour vous faire plaisir en matière de création de chara deza (et ça se sent peut-être, mais c’est une de mes étapes préférées dans la création d’un projet °^°). Vous n’avez à présent plus qu’à vous habituer à dessiner le nouveau venu au travers de toutes sortes d’esquisses !

Destiany esquisse
Esquisses de Destiany

Evidemment vous n’êtes pas obligés d’apporter le même soin de design à tout vos personnages. Sincèrement, on se fout de la manière dont se fringue vos figurants autant que de la dernière saison de Secret Story. Cependant il est important de ne pas bâcler le visuel des personnages importants, car c’est eux qui vous permettent en partie d’imposer votre patte, votre univers. Ces personnages reflètent votre goût et vos influences, alors voyez y une sorte de cour de récréation où vous pouvez imposer votre style et laisser place à votre créativité.

J’ai le sentiment cependant d’avoir surtout parlé au nom de ceux qui développent leurs univers dans un contexte relevant principalement de l’imaginaire. Mais il est également tout a fait faisable de réaliser des chara design intéressants à notre époque (comme l’a su prouver Ai Yazawa avec ses mangas Paradise Kiss et Nana). C’est cependant à mes yeux une tâche un peu plus subtile car le mauvais goût s’invite assez facilement dans ces cas là et il est pas de mauvais aloi de se renseigner en matière de mode histoire de voir ce qui se fait et surtout, ce qui fonctionne (sans non plus devenir des fashion victime lobotomisée, me faite pas dire ce que je n’ai pas dis!). Personnellement pour ce type de design j’ai mes propres sources d’inspiration…

chara design 2

Oui je sais, y’a pas de quoi être fière, ne me jugez pas ok ?

Créer une personnalité: Micmac psychologique

Avant de vous lancer dans la création de votre récit, il s’avérera judicieux que vous soyez fixé sur un point qui ne peut attendre que vous ayez davantage avancé dans votre projet : la mise à bas de votre personnage principal.

Cela serait fort sympathique pour le développement futur de votre scénario que vous mettiez un point d’honneur à vous montrer quelque peu minutieux sur cette étape. L’air de rien elle se montrera cruciale pour la suite des événements, TOUTE l’intrigue va graviter autour de votre ou de vos PP (oui, je vais utiliser PP pour Personnage Principal, un peu la flemme voyez vous). Votre PP va vivre et surtout subir votre récit. Il va parfois progresser, parfois stagner, parfois échouer…. Mais avant de lâcher votre petit bonhomme dans la nature, il serait de bon aloi de faire un maximum connaissance avec lui. Et je ne vous demande pas là de me faire un résumé comme si vous veniez de rencontrer votre perso en speed dating… vous devez TOUT savoir à son sujet. Pas uniquement son nom et son âge, mais ce qu’il fait dans la vie, ses tics, ses obsessions, ce dont il a conscience ou non… tout. Si votre perso a brusquement la dalle à 3h du matin, vous devez savoir s’il préfère se contenir, se faire un petit encas ou s’il fonce presto au McDo du coin.

Mais je ne vais pas tourner plus longtemps autour du pot et lancer les hostilités dès maintenant en vous présentant LA formule. Oui, LA formule qui vous permettra de mieux connaître votre perso jusqu’à l’os… il s’agit du :

Y=F(X)

Article 1

C’est bon je vous ai tous récupéré ? Calmez vos ardeurs car nous n’allons nullement parler de maths mais bel et bien de création, même s’il va falloir faire preuve d’un petit peu d’esprit logique. Décarcassons ensemble le bestiau et vous verrez que ça n’a absolument rien d’insurmontable.

Y: L’identité à proprement parlé.

Il s’agit tout simplement du nominatif de votre personnage. Prénom, nom de famille si vous voulez en mettre un, ou même surnom si celui-ci est vraiment important (par exemple si le véritable patronyme de votre personnage est inconnu ou s’il est extrêmement connu de par son surnom, comme par exemple dans One Piece avec « Luffy au chapeau de paille »).

F: Son profil.

Le F fait plus ou moins office de carte d’identité à votre personnage. Dedans vous y mettez l’âge, les caractéristiques physiques (sauf ce qui est de l’ordre de l’accessoire ou des modifications corporelles : piercing, tatouage, coupe de cheveux etc ), ce qu’il ou elle fait dans la vie… Si vous vous lancez dans un récit fantaisie ou de SF précisez également à quelle « espèce » appartient votre PP (exemple : Elfe, fée, cyborg, ange, démon, etc…). Mentionnez également s’il possède un quelconque pouvoir, mais cela uniquement s’il s’agit de particularité innée (un pouvoir acquis sera davantage considéré comme une accessorisation du personnage, et sera donc rangé dans la même catégorie qu’un piercing ou un tatouage).

X: Sa psychologie.

Ah là on attaque le plus gros du morceau. Le « X » est représenté par un ou des éléments faisant vraiment la caractéristique du personnage. Cela peut être un accessoire, un tic, une manière de s’habiller, s’exprimer ou de bouger… cela peut être tout et n’importe quoi ! Cet (ou ces) attribut devra être récurrent dans votre futur scénario. Il permettra à votre PP de se démarquer des autres au cours du récit, de lui donner un côté attachant ou détestable, mais également de fixer son psyché.

Le rapport avec le psyché ? Pensez vous que le chapeau de Luffy, les cernes de L de Death Note ou le look de Hiruma dans Eyeshield 21 sont de l’ordre de l’anodin? Non, tous contiennent de par leur présence des informations sur la mentalité, les objectifs et surtout les faiblesses de ces personnages. Il va donc falloir creuser à partir de l’élément choisi. Pourquoi votre perso possède-t-il ce « X » ? C’est cela qui nous intéresse ! Ainsi il est de bon ton de méditer sur le sujet de cette manière !

Le X

La raison de l’existence du X

La conduite que le personnage adopte au quotidien par rapport à ce X

Problème latent créé par le X

Je me rends bien compte que tout ce que je raconte peut paraître un peu abstrait, et du coup j’ai prévu des exemples tirés de mes propres créations (crées au cours de ma formation) qui j’espère vous permettrons de comprendre le cheminement à parcourir.

Exemple 1 :

Raya

Y: Raya

F: 17 ans. Chasseresse. Peau mate, cheveux blancs, yeux dorés, oreilles pointues et queue en pointe. Appartient au peuple des Nassaï (un peuple que j’avais créé à l’époque)

X: Possède une chevelure tellement emmêlée qu’une souris y a élu domicile pour installer son nid

Elle passe plus de temps à s’entraîner pour améliorer ses capacités en tant que chasseresse plutôt que de prendre soin d’elle

Elle espère qu’en devenant une indispensable du village, les autres Nassaï lui seront constamment redevable

Elle a besoin du regard de ses semblables pour se construire une estime sur sa propre personne.

En résumé : C’est une fille manquant cruellement de confiance en elle et qui s’acharne à s’améliorer dans le but d’être le centre de l’attention de ses semblables.

Exemple 2 :

Sylphé

Y: Sylphé

F : 16 ans. Fils de bonne famille. Cheveux blonds, yeux bleus.

X: Joue du violon en improvisant, refuse catégoriquement de suivre une mélodie pré écrite

Il aime être libre de jouer ce qu’il lui plaît, plutôt que de contenter de suivre une partition

Pour lui, suivre un ordre pré établi, c’est renoncer à son indépendance et à son individualité.

Il pense agir en dehors des moeurs en adoptant un pseudo comportement de marginal, mais ne propose pas de réelle solution pour remplacer une société en dehors de laquelle il ne pourrait vivre.

En résumé : Sylphé se donne des airs de « Je m’en fous je fais ce que je veux de toute façon ce monde il est pourri » mais serait bien incapable de survivre en dehors de cette société qu’il conteste.

Exemple 3 :

Lullaby

Y: Lullaby

F: 18 ans. Travaille comme mascotte dans un parc d’attraction. Cheveux châtains, yeux verts, petite taille.

X: Porte pratiquement en permanence son costume de mascotte, même en dehors de ses heures de travail.

Une partie de son visage ayant été brûlée quand elle était plus jeune, elle se sert de son costume pour cacher ses blessures.

Elle compte sur son masque afin d’attirer la curiosité et la sympathie des gens, afin qu’ils aient de l’affection pour elle

Elle cherche à s’attirer l’empathie des gens qui se sont attachés à elle afin que ceux ci fassent preuve de pitié au moment où elle dévoile son vrai visage.

En résumé : Elle passe par des artifices pour se faire valoriser plutôt que de chercher à se faire apprécier pour ce qu’elle est.

Voilà, j’espère que les exemples vous ont permis de comprendre comment fonctionne le bousin. En général l’analyse se fait en trois temps, mais on peut la pousser encore plus loin si le cœur nous en dit ! Une fois votre «cheminement» terminé, vous touchez à ce qui fera tout l’intérêt de votre personnage, l’El Dorado de son développement psychologique: un problème à résoudre ! Vos possédez à présent une pierre de plus à poser sur les futures fondations de votre récit : ce qui fera la quête latente de votre personnage, ce qui lui permettra d’évoluer et de sortir grandis de l’aventure dans lequel vous allez le plonger.

Evidemment, il est parfaitement possible de se passer de la formule Y=f(x) pour travailler l’identité de votre personnage. Je trouve juste que cette méthode est plutôt bien pour débuter car elle présente un système de classification somme toute assez classique et donc qui permet de ne pas se perdre dans ses propres idées. Mais qu’importe la manière de s’attaquer au morceau, en principe si vous pouvez imaginer votre perso dans n’importe quelle situation sans trop d’effort (comme l’exemple de la fringale nocturne que je vous ai donné en début d’article) normalement il est mûr! Vous pouvez par ailleurs évidemment effectuer cette méthode avec les personnages secondaires. L’opposant de votre héros par exemple se doit lui aussi d’être traité avec doigté !

J’ai conscience que cela laisse peu de place à la spontanéité (quoi qu’à force de vous exercer avec le Y=F(X), vous pouvez spontanément créer des personnages avec une profondeur exploitable °^°) mais faites moi confiance, on peut tout à fait être à la fois réfléchis et créatif !

Et surtout… je vais pas vous mentir, j’ai fais cet article car j’en ai un peu marre de voir proliférer ce type d’OC (Original Character) :

Faut pas croire, en vrai j'aime bien les fanfictions °^°
Faut pas croire, en vrai j’aime bien les fanfictions °^°

Création d’un univers : Être le fondateur de son Empire

Avouez, ça vous est déjà arrivé d’avoir un pote du genre un peu trop créatif qui essaie de vous expliquer son projet de roman/manga/série mais qui au final a seulement réussi à vous paumer alors qu’il n’était même pas au commencement de l’introduction de son exposé. Cependant, malgré toute la bonne volonté et toute la motivation qui peut se trouver derrière l’élaboration d’un projet, si celui ci est aussi évident à comprendre qu’une notice Ikéa, c’est qu’il y a un défaut de fabrication quelque part !

créa monde 2.jpgtexte

Alors pour éviter ce type de situation, soyons clair dès maintenant : FIXEZ ce dont vous voulez parler ! Votre univers est la toute première pierre posée au nom de l’édifice de votre projet, et s’il n’est pas solide vous pouvez être sûr que vous n’irez nulle part. Pour commencer un point très simple : de quoi avez vous envie de parler ? De samouraï ? De chevalerie ? De licorne ? De cactus mutants ? D’invasion de dindon zombie ? Le tout est de commencer par définir ça : quel sera le noyau ? Et pour cela, voici trois possibilités de base pour votre future pierre angulaire :

Possibilité 1 : Notre monde + [ élément de votre choix ]

Il s’agit de prendre notre monde et d’y ajouter l’élément qui fera que cet univers diffère du notre. Exemple :

schéma 1

Monde + Magie = Harry Potter

Nous avons le cas de l’addition entre notre monde contemporain et la pratique de la magie. A partir de cela de nombreux paramètres doivent être pris en compte : les lois, la politique, le rapport entre sorciers et non sorciers (Moldus pour les connaisseurs), les études…tout est calculé afin que le simple ajout de cet élément aboutisse à la création d’un univers complet, cohérent et pertinent dans les sujets qu’il traitent.

Possibilité 2 : Notre monde – [ élément de votre choix ]

Même procédé que pour la possibilité 1, sauf que l’on soustrait au lieu d’ajouter. Exemple :

schéma 2

Monde – Abondance d’eau = Hokuto no Ken

Hokuto no Ken (ou Ken le survivant pour nous autres bouffeurs de grenouille) se déroule dans un monde post apocalyptique auquel on enlève l’omniprésence des grandes surfaces d’eau, faisant de cette dernière une denrée rare. Le fait de rendre ardu l’accès à un élément vital installe tout de suite une ambiance de mal être, et on sait immédiatement que l’on a affaire à un univers où la survie prend une dimension importante. Soit dit en passant, je vous déconseille fortement de faire votre premier monde en enlevant un élément naturel. Par exemple enlever l’intégralité des océans, tout les insectes, tout les arbres etc… Mère nature est bien faite, j’peux vous assurer que vous allez en baver pour trouver un moyen de faire fonctionner le système malgré tout !

Possibilité 3 : Notre monde + ( [ élément de votre choix ] <=> [ élément de votre choix ] ) il s’agit d’une sorte de fusion entre les deux schémas précédents. On prend une base, on y enlève un élément, et on remplace le dit élément par un autre… ce qui peut donner… Exemple :

schéma 3

Monde + ( Chimie et sciences physiques <=> Alchimie ) = Fullmetal Alchemist

L’excellent manga de Hiromu Arakawa possède lui aussi son schéma ! On y voit un monde que l’on peut penser imaginé de l’occident du début du 20ème siècle. Si la médecine et la mécanique sont bien présentes, les sciences de la physique et de la chimie ont quant à elle totalement disparue au profit de l’alchimie. L’alchimie est au cœur de tout : on la voit dans l’armée, dans les hautes sphères de l’Etat, chez le bas peuple, le principe même de l’échange équivalent est absolument omniprésent. Ce simple schéma nous permet donc d’obtenir : Amestris.

Maintenant que vous avez choisi votre schéma, à vous de régler vos paramètres. De quelle époque allez vous vous inspirer ? Quel est le régime politique ? Quelle est la monnaie ? Comment fonctionne le commerce ? Comment les richesses sont elles réparties ? Quel est le rôle de l’armée ? Où en est l’avancée technologique ? Y a-t-il une religion dominante ? Comment ça se passe au niveau de l’éducation ? A partir de quel âge devient-on majeur ? Le calendrier est-il le même que le notre ? Toutes, oui j’insiste, TOUTES ces questions doivent avoir des réponses ! Dites vous qu’à partir du moment où vous êtes incapable de répondre à une interrogation sur votre projet, c’est que quelque chose n’est pas fixée, et vous devez connaître votre projet aussi bien que le placard où vous rangez vos paquets de céréales.

Une fois que vous êtes sûr de vos fondations, affinez votre création, créez lui un historique, des personnalités importantes, faites vivre votre projet, il sera le théâtre de vos intrigues alors soignez le !

Une fois tout cela mis au point, vous pouvez vous mettre à réfléchir sur les thématiques que peuvent soulever cet univers, et grâce à cela, vous pouvez déjà voir naître le début de votre futur fil rouge !

Oh et pour clore cet article, un autre point important. DOCUMENTEZ VOUS ! Vous allez sûrement être amenez à parler de sujets avec lequels vous n’êtes pas familier, ne vous lancez surtout pas à l’aveuglette ! Internet, livres, documentaires, films historiques, tout est bon pour enrichir vos recherches ! En revanche pour les recherches sur Internet, faites vraiment très attention aux formules tapées dans le moteur de recherche, vous pouvez avoir de très, très, TRES mauvaises surprises… je parle d’expérience.

beurk...
Genre… ce genre de situation…

Sur ce, bonne chance à tout les courageux qui tentent l’expérience de se créer un monde! C’est un boulot colossal, mais une fois qu’on en arrive à bout, le moment où l’on se sent le fondateur de son propre empire valait bien toutes ces heures de dur labeur!